Les santons de Provence

Si on veut évoquer la Provence, cela n’est pas bien difficile : il suffit de chantonner la Nationale 7 d'après Charles Trenet. Aussitôt on se rappelle les bons moments des dernières vacances estivales ensoleillées en Provence.


La mer, la sieste, les cigales et l’anisette autant de symboles attachés à cette région qui font regretter aux nordistes qui s’y sont aventurés de devoir s’en éloigner pour un an. Avec ses agréments, l’été, la Provence est non seulement une région enviée mais aussi l’une de celles à l’identité très forte. 


Mais dans l’imaginaire populaire, dans la littérature, celle de Frédéric Mistral, celle d’Alphonse Daudet, de Giono ou de Pagnol, la Provence ne peut se réduire à son évocation estivale. 

En effet, autour de La Nativité et les différentes manières de la vivre en Provence, on trouve là aussi, autant de témoignages de l’attachement profond et unanimement répandu dans toutes les couches de la société provençale à des traditions très emblématiques.


On peut citer le repas de Noël avec ses treize desserts, la messe de minuit, la crèche vivante ou non, dans les églises ou chez soi ...

Une autre façon de retrouver son identité provençale est d’assister en famille à une représentation théâtrale de la Nativité qu’on appelle une Pastorale et dont la plus connue est celle de Maurel jouée rue Nau à Marseille depuis 1844. Cette pastorale comprend 5 actes, tous en provençal, sauf le 4ème en français.


Que ce soit en ville ou à la campagne, fêter la Nativité en Provence débute dès le 4 Décembre, à la Sainte Barbe, lorsque l’on plante le blé et que l'on commence à sortir de leurs boîtes où ils ont dormi pendant un an, enveloppés dans des tissus ou du papier journal, les guirlandes, les crèches, les santons et tout ce qui sera nécessaire à une fête de Noël réussie.


                                            

La tradition des santons de Provence


Sans ces figurines que l'on appelle “santons” en Provence, il ne saurait y avoir de crèche digne de ce nom ou de fête  de la Nativité valable.

L’oeil ravi et joyeux des enfants qui redécouvrent ces petits personnages, les  précautions inquiètes des grandes personnes pour les remettre au jour, sont des signes que cette exhumation relève du sacré. A chaque nouvelle statuette qui apparaît, ce sont d’autres grands cris et toutes sortes d’histoires qui reviennent au souvenir des Noëls passés.

 

La préparation de cette fête est bien codifiée et fait l’objet pour ainsi dire de compétitions entre différentes paroisses. Dans les crèches vivantes, comme ce le fût dès le Moyen Âge, autour d’un bébé se rassemblent des animaux et des personnages tels qu’on pouvait les imaginer autour de Jésus.

Petit à petit, l’imagination et les traditions aidant, toute une scénographie s’est mise en place pour faire comprendre le mystère de la Nativité.

Chaque génération se sent investie du devoir de transmettre au travers des pastorales ou des crèches la symbolique non seulement religieuse, mais celle aussi des traditions régionales, voire locales.




Les origines de la crèche et de ses santons de Provence


Les premières crèches sont celles des églises au Moyen-Âge avec des personnages moulés à la cire et participent à l’adoration de Jésus enfant. On verra apparaître à la fin du 18ème siècle des crèches particulières sous la forme d’abord de la Nativité entourée de Saints, puis après la Révolution sous la forme domestique que nous connaissons.

Cette transformation est due à l’invention du santon d’argile crue par Jean-Louis Lagnel (1764-1822). ll créa des petits personnages en argile, reproduisibles par moulage; ainsi chacun put avoir sa propre crèche.


Le mot santon vient de “santoun”  c’est à dire petit saint. Ils sont aujourd’hui en argile cuite et les artisans qui les fabriquent sont les “santonniers”. 


Certains sont célèbres et les spécialistes reconnaissent leur facture. Les noms de Carbonel à Marseille, d’Escoffier à Aubagne font rêver ceux qui installent chaque année leur crèche. 


La mise en place de la crèche et ses santons


On place Marie près de l’âne, Joseph près du boeuf. 

Entre les deux on laisse l’espace vide où l’on mettra au dernier moment l’enfant Jésus.

Les rois mages seront placés en arrière, loin avant de les faire progresser jusqu’à leur arrivée, près de Jésus à l’Epiphanie.

On pourra, ensuite, en fonction des santons dont on dispose personnaliser sa crèche, mettre dans le décor une petite rivière avec son moulin et le meunier, une colline avec un troupeau de moutons, le berger et son chien.

Une vieille femme tirant son fil, le rémouleur, un vieil homme sur un banc fumant sa pipe. 

Tous les anciens métiers sont mis à l’honneur immobiles dans leur geste caractéristique mais parfois rendus mobiles par un mécanisme de roue ou de poulie comme la fontaine qui coule en permanence.


Un personage caractéristique est toujours placé et recherché parmi tous ceux qui sont présents. Où se trouve-t–il ? Où est Lou Ravi, ce personnage sympathique mais demeuré qui symbolise l’idiot du village avec ses deux bras dressés vers le ciel?

 

Chacun de ces personnages est peint, habillé comme il  l’était à l’époque.







Les petits plus sur les santons

On comprend les enfants qui peuvent rester longtemps à contempler chacun de ces petits tableaux de vie que constitue chacun de ces santons. On comprend aussi la fierté de ceux qui, à leur tour, expliquent ce qu’ils ont adoré, eux-mêmes, il n’y a finalement pas si longtemps.

 

Accroître sa collection de santons, les disposer d’une nouvelle façon, mais conserver l’essentiel immuable, c’est la joie sans cesse répétée que procurent ces petits objets inanimés. 






Publié le 04/01/2019